15 Oct GENERALISATION DU TELETRAVAIL : QUID DE L’INTELLIGENCE COLLECTIVE ?
Le télétravail se généralise, non sans poser un certain nombre de questions. Cet article apporte des solutions concrètes à la réussite de cette nouvelle modalité de collaboration entre les personnes.
LE TELETRAVAIL : UN MONDE NOUVEAU A APPREHENDER
Le contexte actuel fatigue excessivement les pratiquants du télétravail, pour des raisons multiples. Le risque d’une baisse durable du moral des salariés est réel. Face à cela, il est essentiel de mettre en place (enfin !) de nouvelles modalités managériales et de travail ensemble.
Des télétravailleurs fatigués
Un article de Libération en date des samedi 19 et dimanche 20 septembre 2020 constate une fatigue généralisée au sein du monde du travail. D’après les auteurs, cette fatigue comporterait des spécificités propres et prendrait sa source dans des éléments conjoncturels inédits, liés à la Covid et à ses conséquences sanitaires. Citons quelques unes de ces causes :
- Port continu du masque dans les entreprises qui nécessite à la fois de parler plus fort et d’écouter avec davantage d’attention; contraintes des gestes barrières.
- Lien social en entreprise complètement troublé, ambiance morose, énervement.
- Déceptions du fait que la situation va perdurer sans que l’on sache combien de temps, voire s’aggraver, qui entraine un sentiment d’impuissance; décisions des autorités publiques qui engendrent toujours plus de contraintes et d’exigence personnelle pour les respecter.
- Vulnérabilité psychologique liée à la difficulté de se projeter dans un environnement dont on sait qu’il est temporaire et spécifique, mais dont on ne sait pas combien de temps il durera.
- Séquelles plus ou moins bien digérées du confinement.
- Loisirs en jachère.
- Télétravail avec ses conséquences d’imbrication entre vie professionnelle et vie privée.
- Rentrée scolaire plus ou moins difficile.
- Épées de Damoclès multiples, aussi bien sanitaires qu’économiques.
Tout cela provoque selon les auteurs fatigue et angoisse généralisées, entrainant, entre autres conséquences constatées, un accroissement notable de la consommation d’anxiolytiques. Clairement, nous vivons des temps difficiles, auxquels nul n’était préparé.
Managers : changer, c’est maintenant !
Pour autant, la période comprend aussi une formidable opportunité : celle de reconsidérer en profondeur nos modalités de travail collectif, qui montrent depuis trop longtemps leurs limites, tant en terme de souffrance perçue que d’efficacité. Le confinement a en effet contraint les entreprises à la pratique du télétravail, auquel elles demeuraient frileuses jusqu’alors dans leur écrasante majorité. La Covid a imposé sa loi : confinés, il a bien fallu se mettre au travail à distance. Et là, bingo ! D’après un sondage réalisé par le groupe de protection sociale Malakoff Humanis, 89% des salariés ont pris goût au travail à distance et 75% attendent de leur employeur qu’il tire les leçons du confinement sur l’organisation du travail. Parallèlement à cela, certains grands groupes ont franchi un pas majeur en imposant à des milliers de salariés 3, voire même 4 jours de télétravail par semaine ! A n’en pas douter, la part de télétravail va augmenter dans les temps à venir et cette tendance semble lourde.
Malheureusement, cette perspective ne signifie pas que tout le monde soit content, loin s’en faut. D’un côté, les managers craignent – voire constatent – un désengagement de leurs collaborateurs. De l’autre côté, ces derniers observent trop souvent un accroissement des processus de contrôle; et sur ce plan, on peut leur faire confiance, les fous de la surveillance ne déçoivent jamais (voir ici ce terrifiant article) ! En fait, si les choses vont globalement dans le bon sens, la rapidité de mise en place de cette véritable révolution – a minima, de « la vie au travail » – n’a pas permis véritablement d’envisager posément toutes les conséquences de ce changement. Ce sont quelques-unes de ces répercussions que nous vous proposons d’aborder thématiquement, pour évaluer comment continuer à augmenter le niveau d’intelligence collective dans ce monde nouveau, et parvenir à concilier télétravail, productivité et créativité.
TELETRAVAIL ET TECHNOLOGIE NUMERIQUE
Le télétravail, par définition, est totalement dépendant de la technologie numérique. Se pose donc la question de la fiabilité des plateformes de « videochat » et de conférence, que ce soit en terme d’intelligence économique – confidentialité, sécurité, etc – qu’en terme de capacité à gérer la connexion de multiples intervenants. Sur ce second point, est par exemple souvent constatée la nécessité de couper les caméras des participants pour améliorer la qualité audio. L’effet en est évidemment particulièrement négatif, puisque dans ce cas – fréquent chez nombre de nos clients – cela revient à passer des heures au téléphone ! Pour illustrer, étant nous-mêmes en charge de formations à distance, nous pouvons largement témoigner que la réussite des dites formations tient beaucoup à la qualité de deux nouveaux acteurs : la bande-passante et l’application numérique ! Ces – fréquents – dysfonctionnements rendent exécrables les conditions de travail, tant en terme de stress que de résultats. Donc, de grâce Messieurs et Mesdames les chefs d’entreprises, ne faites pas d’économie de bout de chandelle sur la qualité des applications choisies ! A défaut, objectifs et décisions ne pourront que prendre du retard.
TELETRAVAIL ET PERSONNALITES
Le vécu du télétravail dépend beaucoup, on s’en doute, de la personnalité de chacun. Ce qui est plus surprenant, c’est de constater combien les différences de perceptions, croyances, auto-injonctions, etc. peuvent relever du grand écart. Par exemple, un tel pourra se sentir obligé de faire du zèle, parce que distancié, son chef ne peut pas voir à quel point il est impliqué; un tel autre se montrera totalement insensible à cette auto-pression, considérant que seul compte et doit compter ce qu’il délivre, et non pas l’impression qu’il produit. D’aucuns convertiront leurs habituels horaires de déplacement en temps de travail effectif (je pars à 7h45, donc je commence à télétravailler à 7h45); d’autres s’attacheront à respecter scrupuleusement le rythme habituel (je pars à 7h45, j’arrive au bureau à 8h45, je commence donc à télétravailler à 8h45). Certains négligeront la pause déjeuner; d’autres profiteront du télétravail pour davantage remplir leur journée de temps personnel. Loin du bureau, certaines personnes hésiteront à demander de l’aide; d’autres, au contraire, profiteront de cette occasion pour créer du lien, ce lien qui peut tant leur manquer. Des salariés peuvent aussi se montrer très gênés qu’une caméra perçue comme intrusive puisse révéler ne serait-ce qu’une portion de leur univers personnel, quand d’autres au contraire ne comprennent même pas que pareille réserve puisse exister. Dernier exemple de différences : le télétravail peut avoir un effet démotivant, voire même « désengageant »sur certains collaborateurs ou managers, quand d’autres au contraire connaissent un regain d’enthousiasme à l’idée de travailler dans un univers choisi, perçu peut-être comme plus serein, apaisant, ou plus responsabilisant, etc.
Face à cette diversité de perceptions, nous recommandons que les équipes se dotent de règles de fonctionnement collectif, de façon à ce que chacun puisse trouver son rythme, sa place. Ces règles devront émaner à la fois du manager et de tous les membres de l’équipe, pour répondre à la question suivante : de quoi chacun a-t-il besoin pour être durablement efficace dans ce contexte nouveau de télétravail généralisé? Il s’agit aussi de ne pas perdre de vue que si la confiance n’exclue pas le contrôle, un contrôle excessif écrase l’initiative, génère du stress – inutile – au prix d’un engagement décroissant, puisque fondé de plus en plus uniquement sur la contrainte.
TELETRAVAIL ET CHARGE MENTALE
Il apparait après ces quelques mois de pratique intensive du télétravail que les personnes se trouvent souvent confrontées à deux problèmes liés entre eux : une forme de porosité entre la vie professionnelle et la vie personnelle et, conséquence directe ou indirecte, une charge mentale accrue. En fait, ces problématiques illustrent la difficulté que chacun peut avoir à partitionner son temps – pro et perso – tandis que ces deux cycles de la vie, traditionnellement juxtaposés, se confondent nouvellement dans une unité de temps et de lieu. Le sujet s’avère bien plus délicat qu’il n’y parait au premier abord, puisqu’il intègre notamment : le partage du temps, le partage du lieu avec un conjoint qui télétravaille peut-être aussi, le partage de pièces du domicile le plus souvent difficilement compatibles avec une activité professionnelle – ergonomie, isolation phonique, etc. – le partage des exigences familiales – celles-ci étant, du fait des exigences sanitaires, souvent plus importantes qu’à l’accoutumée – etc. Oui, tout cela se mélange, dans un contenant à la fois psychologique – notre esprit – et physique – notre lieu de vie – qui n’était pas préparé à cela. La recette? Il n’y en a pas : tout cela est lié à une considérable somme d’obligations et de changements qui se sont faits jour depuis la crise de la COVID. En revanche, pour maintenir l’engagement des personnes et la qualité de travail, il est essentiel d’accompagner ces changements : « mettre » de l’humain, comme nous allons le décrire au paragraphe suivant; allouer un budget à la location de tiers-lieux pour que le travail se fasse éventuellement en-dehors du domicile, dans des conditions plus favorables; mettre à la disposition de chacun le matériel nécessaire au travail à distance, etc. Accompagner, donc. Et investir. Assurément, 2 mots clés.
TELETRAVAIL ET MANAGEMENT
Clairement, le télétravail ne saurait s’accommoder d’un management « command & control » traditionnel. Notamment, il convient de professionnaliser le relationnel pour optimiser son impact et son influence; co-élaborer avec chaque salarié des objectifs dont le suivi tiendra lieu de contrôle; favoriser la collaboration entre salariés à poste et personnels en télétravail en les enjoignant de se fixer des règles de fonctionnement collectif; œuvrer à l’intégration de nouveaux arrivants en les intégrant dans des process d’intelligence collective effectifs.
Un relationnel à « professionnaliser »
Une des opportunités de cette révolution tient au fait que le management doit (enfin !) faire sa mutation. Nous l’avons vu, la gageure est de maintenir – à distance – le niveau d’engagement des équipes. La lecture de ce qui précède indique que cela nécessite de passer par des stratégies relationnelles individualisées, adaptées à la personnalité de chacun. Clairement, on ne saurait fonctionner dans une quête éperdue de contrôle; les effets sur l’engagement et la pro-activité des salariés en seraient délétères. Comment agir alors pour que l’ensemble des personnes demeurent engagées et se prémunir des chutes de motivation le plus tôt possible ?
Il convient en préalable à toute autre réponse de considérer une bonne fois pour toutes que la qualité du management des hommes est totalement dépendante des aptitudes relationnelles du manager. La distanciation compliquant encore un peu plus les choses, il convient plus que jamais de faire preuve d’humanisme, à savoir en l’occurrence, de s’intéresser aux « ingrédients » – jamais identiques du fait de la diversité des personnalités – nécessaires à l’épanouissement de chacun des collaborateurs. De quoi un tel a-t-il besoin pour bien vivre son travail et s’y montrer engagé et performant ? A l’inverse, qu’est-ce qui pourrait l’en décourager ? Pour répondre à ces questions, il convient d’être non seulement attentif à l’autre, mais aussi proactif dans la découverte de ses aspirations et plus généralement de son contexte et de la perception qu’il en a. En trois mots : discuter pour découvrir. Le manager n’est bien sûr pas une nounou, mais il est tout aussi certainement capitaine d’équipe et ne saurait à ce titre se dispenser d’en connaître les membres. Et pour cela, on a encore rien trouvé de mieux que la sollicitude, et donc la relation. Une équipe, çà se soutient, on s’y sert les coudes, et c’est bien au manager que revient d’être garant de cet esprit qui a pour conséquence, est-il besoin de le rappeler, de produire du résultat durablement, de limiter le turn-over, de faciliter l’émergence de solutions, etc. Faute de cette attention, l’engagement des salariés dans ce contexte de travail à distance s’en verra affecté dans des proportions dangereuses.
Des objectifs correctement élaborés pour éviter les excès de contrôle
Nous recommandons également la pratique d’un management par les bien connus objectifs SMART, auxquels nous ajouterons une composante de responsabilité individuelle. Par exemple : vous avez un objectif de département, de service, de région, etc.; il convient donc de définir avec chaque membre de l’équipe ce que doit être sa contribution propre – qui doit elle-même être SMART. Les objectifs sont donc rigoureusement « codéfinis », chacun sait ce qu’il a à faire, ce qui lui devient par définition opposable. Ceci étant posé, le contrôle s’exercera sur ce qui est réalisé, tant au plan qualitatif que quantitatif; autrement dit, bien davantage sur le « quoi » que sur le « comment ». Dans l’hypothèse où l’on doute de la capacité du collaborateur à s’autodiscipliner, nous dirons qu’il s’agit alors d’un collaborateur encore insuffisamment autonome; ce qui signifie que cette situation insatisfaisante ne pourra pas perdurer dans le temps : il devra progresser, jusqu’à acquérir sa pleine autonomie. Ceci étant dit, il arrive aussi encore bien trop fréquemment que ce soit le manager lui-même qui pose problème : stressé par la distanciation de ses collaborateurs, le chef d’équipe rentre alors dans une éperdue quête de contrôle pour se rassurer. Les conséquences ne tardent pas à se faire sentir : stress général, désengagement, arrêts-maladies, etc. Allant dans ce sens, une psychanalyste, Lise Gaignard, spécialiste en psychologie du travail constate : « plus les gens ont la main sur le travail, moins ils sont fatigués ».
Collaboration entre télétravailleurs et salariés à poste
Il peut en outre s’avérer compliqué de maintenir un bon niveau de collaboration entre personnels en télétravail et salariés « à poste ». En effet, de nombreux métiers ne peuvent s’accommoder du travail à distance, et la question de la collaboration entre distanciel et présentiel se pose nécessairement. Dans ce sens, là encore, de nouvelles règles de fonctionnement ensemble, qui tiennent compte du contexte de chacun, sont à établir : comment communiquer? Quand? De quelle façon? Oui, c’est basique, mais donnons-nous la peine de fonctionner ainsi et les choses en seront considérablement facilitées. En l’état, pareille démarche est encore très insuffisamment usitée, ce que nous ont confié les salariés d’un grand groupe industriel.
Télétravail et intégration des nouveaux arrivants
Enfin, une question se pose : comment intégrer les nouveaux arrivants dans ce contexte de travail distancié ? Ce questionnement remonte du terrain, puisque ce sont des participants/clients qui nous l’ont rapportée. Nous recommandons à cet égard de procéder simplement. Si cela est possible, que ce soit pour une équipe fixe ou en mode projet, il est évidemment utile d’organiser une réunion (virtuelle au besoin) pour que les présentations soient faites. Selon nous, ce qui compte le plus, c’est que rapidement tous les participants connaissent : l’identité de chacun; ce que chacun a pour mission de faire; comment chaque personne peut être utile à la tâche du nouveau; ce que chacun attend du nouvel arrivant – et réciproquement – en terme de production de contenu. Un tel échange aura d’autant plus de conséquences positives s’il déclenche d’autres interactions sur le thème « il faut que l’on se parle parce qu’on a besoin de s’entraider ». Le nouvel arrivant sera alors concrètement intégré, puisqu’il prendra activement part à un process d’intelligence collective. Il convient évidemment que le manager se montre proactif pour emmener l’équipe dans ce mouvement d’échanges.
On le constate largement, la généralisation du télétravail nécessite que le management évolue rapidement et durablement dans son paradigme au profit de l’engagement, de la motivation et de l’autonomie des équipes.
TELETRAVAIL ET DROIT DU TRAVAIL
Dans le fil du paragraphe précédent, il nous semble utile de relever que la tendance trop répendue au contrôle obsessionnel peut conduire certains manager – et potentiellement entrainer leur direction – en-dehors des limites du droit du travail. Pour faire un point sur le sujet, nous vous renvoyons à l’excellent article du Professeur Miné, titulaire de la chaire Droit du Travail et Droit de la personne au CNAM : https://theconversation.com/teletravail-des-regles-juridiques-a-redecouvrir-et-a-rendre-effectives-145841.
TELETRAVAIL OU PRESENTIEL ?
Certains enjeux exigent de maintenir un certain niveau de présentiel dans les entreprises. Pr exemple, les précédentes expériences de télétravail généralisé ont démontré son insuffisante efficacité lors des phases de créativité collective. De même, assurément, le télétravail constitue un facteur limitant au réseautage. Enfin, il peut favoriser le regroupement en groupes de travail basés sur davantage sur les affinités que sur les complémentarités réelles de compétences. Les entreprises doivent désormais utiliser le présentiel comme un élément fédérateur pour tous ces gens dont le potentiel étiolement du lien peut devenir dommageable.
Le télétravail : pas la solution pour les phases de créativité
La presse a beaucoup évoqué ces derniers temps le cas d’IBM Europe qui s’est inscrite dans une démarche de télétravail généralisé voici bientôt 20 ans, pour finalement revenir partiellement en arrière. La cause de ce revirement a tenu – particulièrement sur le territoire français – à une insuffisance de productivité dans les moments qui exigeaient d’inventer des solutions nouvelles. Clairement, le télétravail ne saurait remplacer toutes les situations de présentiel, notamment dès lors que l’on entend faire « mouliner » un collectif ensemble. Le travail sur plateforme digitale exige une vraie discipline dans la prise de parole, qui si elle peut produire des effets relationnels vertueux, génère aussi des freins importants dans des phases collectives « d’ébullition créative ».
Télétravail et réseau
Il est une autre situation susceptible d’inquiéter les salariés: celle du « réseautage ». Pour bon nombre d’individus, un lieu commun de travail – un siège social par exemple – favorise, par la proximité de tous, la possibilité de travailler son réseau pour avancer professionnellement. L’exercice est clairement beaucoup plus difficile à distance, ne serait-ce que du fait d’un déficit de spontanéité. Sur ce plan là encore, rien ne vaut le présentiel.
Un risque pour la diversité
Il convient enfin de souligner que le télétravail accroit la tendance naturelle à travailler avec les personnes avec lesquelles on s’entend bien « naturellement », pour s’éloigner de celles avec lesquelles la relation est plus difficile. L’avantage du présentiel est qu’il ne donne pas forcément le choix que celui de travailler parfois avec des personnes qui nous sont peu sympathiques, mais dont les compétences demeurent essentielles à la réussite du projet.
Faire du présentiel un évènement fédérateur
Pour toutes ces raison et pour d’autres encore certainement, il apparait, du fait de l’avènement du distanciel, que le travail en présentiel est encore loin d’avoir perdu l’ensemble de sa pertinence. Il convient pour autant, dans ce contexte de choix nouveau, à la fois, de le justifier et de le « solenniser ». Le justifier, parce que réunir physiquement des personnes suppose un ordre du jour partagé qui nécessite que l’on tire tout le parti possible des compétences en présence; autrement dit, réunir des gens pour faire du descendant, à quoi bon? Et le « solenniser », parce que ces réunions doivent constituer des moments de cohésion durant lesquelles chacun peut se sentir heureux et valorisé de contribuer à la réussite d’un collectif aux valeurs et projets communs. Il serait fort dommage de rater ce type d’occasion fédératrice.
CONCLUSION : LE TELETRAVAIL, UN POTENTIEL ACCELERATEUR D’INTELLIGENCE CONNECTIVE
Nous croyons que le télétravail constitue une révolution aux conséquences profondes, ce que ne manquent pas d’illustrer les questions qui suivent. Quelles sont les conséquences du télétravail sur :
- l’immobilier professionnel et son aménagement?
- les commerces – hôtels, restaurants, etc. – qui vivent de la concentration du travail dans certaines zones?
- l’aménagement du territoire : va-t-on assister à un exode rural inversé? Comment adapter les transports publics, ne serait-ce que dans leur fréquence?
- l’aménagement de l’habitat privé? Parce qu’on ne va pas pouvoir considérer longtemps que travailler sur la table de sa cuisine, ou bien assis sur son lit, constituent des solutions pérennes. Alors, comment faire? L’entreprise va-t-elle devoir prendre en charge la mise à disposition d’un bureau au domicile des personnes appelées à télétravailler le plus souvent? Et/ou augmenter ses dépenses de location de bureaux temporaires, proches des lieux de résidence des « télétravailleurs »? Devra-t-elle financer l’achat de mobilier de bureau ad hoc? Les véhicules de fonctions conservent-ils leur utilité ? Quid des tickets restaurants? Etc.
Clairement, la généralisation du télétravail entraine une modification structurelle des modalités de travail et l’intelligence collective dans ce monde nouveau exige que la réalité de ce changement soit considérée dans la totalité de ses impacts, que les questions ne soient pas éludées et que des réponses concrètes soient apportées.
Au bout du compte, le télétravail constitue selon nous une opportunité maj, à la fois pour l’engagement et le bien-être des personnes. Mais pour que cette partition nouvelle fonctionne – entre un distanciel accru, voire majoritaire, et un présentiel valorisé – il est essentiel que management et responsabilité individuelle évoluent. Cela ne viendra pas tout seul, et pardon de prêcher pour notre paroisse, il conviendra, notamment, de se former.
Mais cette fois, il semble bel et bien que le changement soit pour maintenant !
Note : Pour davantage d’éléments sur la pratique du travail en mode distanciel, nous vous renvoyons à deux articles précédents : « Travailler en mode confiné : çà peut marcher » ainsi que « Témoignages sur le travail en mode confiné : quand çà ne marche pas »